La recherche au Laboratoire SLOWPOKE-2

Le réacteur SLOWPOKE-2 du CMR produit un flux intense de neutrons, utilisé à des fins d’enseignement, de formation et de recherche. Il est actuellement employé par des chercheurs du CMR, de l’Université Queen’s et du ministère de la Défense nationale. Parmi les applications analytiques que permet le réacteur, mentionnons l’analyse par activation neutronique, la radiographie neutronique, l’analyse par neutrons retardés, la production de petites quantités de radioisotopes de courte demi-vie, et le traitement par irradiation.

Analyse par activation neutronique pour déterminer la composition en métaux traces

Le flux stable de neutrons thermiques produit par le réacteur SLOWPOKE-2 est idéal pour l’analyse par activation neutronique (AAN). Lors de l’AAN, un neutron est absorbé par un noyau dans le matériau cible, ce qui entraîne la formation d’un noyau composé qui, lorsqu’il est radioactif, se désintègre en un noyau fils. Le noyau fils est généralement dans un état excité, puis se détend par l’émission de rayons X et gamma caractéristiques. L’énergie de ces émissions de photons peut être quantifiée, ce qui permet de déterminer la composition élémentaire des matériaux. La vitesse à laquelle les rayons gamma sont émis du matériau peut aussi être quantifiée – elle est directement proportionnelle à la concentration de l’élément.

L’AAN est la technique de référence de l’American Society for Testing and Materials (ASTM) pour l’analyse élémentaire et la quantification de la concentration. Elle présente des avantages par rapport à d’autres techniques expérimentales, car elle :

  • est non destructive;
  • nécessite seulement une petite quantité d’échantillon (< 2 ml);
  • requiert une préparation d’échantillons minimale;
  • peut identifier divers éléments efficacement, tout en ayant des limites de détection extrêmement sensibles (de 1 ng/g à 10 000 μg/g, selon l’élément).

L’AAN a été employée avec succès pour détecter des éléments traces dans une variété de matériaux, dont les roches, les métaux, les plastiques, la matière organique, les sols et la poussière de ciment. Par exemple, elle a été utilisée pour déterminer la teneur en protéines de plantes avant et après leur modification génétique. Cette technique a servi dans le cadre d’analyses médicolégales, notamment pour analyser les fragments de balle provenant de l’assassinat de J. F. Kennedy. Il s’agit également d’une excellente technique pour analyser des artéfacts anciens, par exemple dans le but de déterminer les types de matériaux utilisés pour fabriquer des pots en argile, ce qui peut constituer un indice d’un contact culturel à cette époque.

détecteur en cristal de germaniumInstrument d’AAN. Le grand cylindre contient l’échantillon et le détecteur à cristaux de germanium.
 

Radiographie neutronique à des fins d’imagerie non destructive

La radiographie neutronique est une technique d’imagerie non destructive. Elle se déroule de façon semblable à l’imagerie à rayons X, car l’échantillon est exposé à des neutrons et un détecteur (du côté opposé à l’échantillon) produit une image de la structure interne de l’objet. Bien que les deux techniques soient souvent utilisées de façon complémentaire, la radiographie neutronique est préférée à l’imagerie à rayons X quand des matériaux de faible densité doivent être différenciés.

La radiographie neutronique est souvent employée pour déterminer l’emplacement de l’eau dans des matériaux ou suivre son mouvement. Par exemple, des chercheurs du CMR ont déterminé la quantité d’eau infiltrée dans la structure interne en nid d’abeille de l’aile d’un CF-188 afin d’évaluer le stress interne et la corrosion auxquels l’avion sera exposé dans différentes conditions de vol.

La radiographie neutronique s’est améliorée, et la tomographie est désormais possible au CMR. Les échantillons sont numérisés pendant qu’ils tournent, puis un traitement post-expérimental permet de produire une image 3D. Les images tomographiques apportent une meilleure perception spatiale à l’analyse. Par exemple, la technique a été utilisée pour observer de manière non destructive une statue de bronze remontant à l’Égypte ancienne.

La radiographie neutronique

Infiltration d’eau dans la gouverne de direction d’un CF-188 (photo gracieusement fournie par le major Paul Hungler)

 

Système de comptage des neutrons retardés pour la quantification de l’uranium et du plutonium

Les scientifiques du CMR disposent d’un système de comptage des neutrons retardés ultrasensible pour détecter des matières nucléaires spéciales. Un réseau de trois détecteurs à l’hélium et d’un détecteur au germanium de haute pureté (HPGe) enregistre les émissions de neutrons et de rayons gamma provenant de matière fissile irradiée en fonction du temps afin de déterminer avec précision les concentrations d’uranium et de plutonium. Le comptage des neutrons retardés est utilisé dans l’industrie minière de l’uranium pour déterminer avec une très grande précision la concentration d’uranium dans les sols. Il est aussi employé en analyse nucléolégale pour assurer la sûreté, la surveillance et l’examen de dispositifs nucléaires.

 

Traitement par irradiation pour créer et mettre à l’essai des matériaux

Le traitement par irradiation consiste à irradier des matériaux avec des particules de haute énergie pour modifier et synthétiser les matériaux et déterminer leurs propriétés (p. ex. corrosion ou résistance mécanique).

Grâce à sa conception en piscine ouverte, le réacteur SLOWPOKE-2 du CMR peut être utilisé pour le traitement par irradiation avec un champ mixte de neutrons et de rayons gamma, comme illustré dans le schéma à droite. Les échantillons sont scellés dans des flacons étanches et placés dans une région du cœur ou de la piscine, selon le ratio neutrons-rayons gamma souhaité.

Au CMR, le traitement par irradiation a surtout été utilisé pour les polymères, les adhésifs à base de polymères et les matériaux composites à base de polymères. Le champ de rayonnement mixte dans la piscine du réacteur a servi à améliorer les propriétés adhésives de matériaux utilisés dans des véhicules spatiaux. Il a aussi permis d’accroître la résistance de matériaux polymères, notamment le poly(étheréthercétone) (PEEK) et le polyétherimide (PEI), qu’on envisage d’utiliser pour fabriquer des contenants d’élimination de déchets nucléaires. Le champ de rayonnement mixte est également utilisé par les chercheurs du CMR pour déterminer la vitesse de corrosion de matériaux employés dans les réacteurs nucléaires.

Schéma du champ de rayonnement mixte dans la piscine

Schéma du champ de rayonnement mixte dans la piscine.

 

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